Une article d’etopia rédigé par MAGALI PLOVIE, Présidente du Parlement francophone bruxellois.
A travers différents exemples, elle met d’abord en avant différents arguments en faveur des dispositifs délibératifs citoyens.
En voici quelques uns (complétés plus loin par un rapport de l’OCDE) :
- La diversification des origines sociales et des manières de penser, sans aucune mesure avec celles des assemblées élues où les profiles universitaires et masculins dominent
- Favorise des recommandations plus progressistes, permet de prendre des décisions plus sensibles
- Permet de sortir d’une opinion publique basée sur des informations insuffisantes ou erronées, et trop peu souvent collective
- Rapport au temps différent des parlementaires et des ministres, ainsi que de l’instantanéité des réseaux sociaux
- Fort sentiment de responsabilité des citoyen·ne·s tiré·e·s au sort, tant à l’égard des autorités publiques que des autres membres du processus
- Contrairement à certain·e·s élu·e·s qui ne se sentent redevables qu’envers leur électorat, les représentant·e·s tiré·e·s au sort peuvent se sentir responsables de l’ensemble de la société, et même des générations futures
- Renforce la confiance du public (si les recommandations sont suivies)
- Renforce la capacité civique des citoyen·ne·s
De manière générale, il s’agirait que les autorités pensent la démocratie participative comme un processus inhérent au fonctionnement de notre démocratie plutôt que de la penser comme un processus ponctuel.
Ensuite, l’autrice s’attache à décrire les commissions délibératives des parlements bruxellois. On en apprend plus sur le comité d’accompagnement, le processus de sélection et la façon dont les délibérations s’organisent.
Elle cite ensuite quelques facteurs nécessaires au bon fonctionnement de ces dispositifs.
Premièrement, quelques critères qui favorisent la participation des citoyen·ne·s :
- Une information en amont qui augmente la chance de se porter volontaire
- Le sentiment d’être compétent·e (qui nécessite un accompagnement, en particulier pour certains publics)
- Le sentiment de servir à quelque chose (renforcé dans le cas de mixité avec des élu·e·s et s’il y a suivi des recommandations)
- Etc.
Pour encourager la participation, en plus des « garderies » et du défraiement prévus, l’autrice propose un congé de citoyenneté, à la manière de qui prévu pour les juré·e·s. En effet, le commissions délibératives s’organisent pour l’instant le weekend, ce qui est difficile à la fois pour les citoyen·ne·s tiré·e·s au sort, pour les élu·e·s et pour le personnel des Parlements, et limite de facto le nombre de commissions pouvant s’organiser sur une année.
C’est ensuite la légitimité du processus qu’elle aborde, en soulignant l’intérêt de compléter le dispositif avec l’option référendaire pour valider les recommandations produites par la commission, ce qui élargit leur assise et permet de ne faire vivre la délibération au-delà des murs des Parlements. Pour cela, une collaboration avec la presse est nécessaire, ainsi qu’une mutation de la façon dont cette dernière traite les sujets politiques.
Enfin, l’autrice plaide pour un système de co-décision. En effet, elle met en avant l’écueil auquel nous nous étions déjà confronté·e·s : l’égalité de pouvoir entre les député·e·s et les citoyen·ne·s tiré·e·s au sort n’est pas constitutionnelle. Notre démocratie étant d’essence représentative, elle limite la participation citoyenne aux seuls votes et droit de pétition. Autre implication des limites constitutionnelles sur les commissions délibératives : les citoyen·ne·s ne peuvent imposer au Parlement de traiter une suggestion citoyenne, comme nous l’avons également constaté au niveau wallon.
Une révision constitutionnelle qui intègre la participation citoyenne est donc un enjeu important par rapport à l’investissement des citoyen·ne·s et au bon fonctionnement des commissions délibératives. Une remise
en question des recommandations issues de la délibération pourrait décourager les participant·e·s au processus ainsi que celles et ceux qui pourraient à l’avenir y participer, fragilisant ainsi le processus dans son ensemble. Surtout quand on sait qu’une raison principale du refus citoyen de participer à des mécanismes de démocratie délibérative est justement la
crainte que la parole citoyenne ne soit pas suivie d’effets… Cependant, il semble évident que cette ouverture constitutionnelle vers un même pouvoir décisionnel aux citoyen·ne·s et aux élu·e·s ne sera possible que lorsque la question de la légitimité du processus sera réglée.
Pour conclure, Mme Plovie suggère qu’après deux siècles consacrés à l’extension progressive du droit des votants, il est temps de faire évoluer notre démocratie sur le plan de la prise de décision.
Vous trouverez le texte complet ci-dessous :
https://etopia.be/wp-content/uploads/2022/12/20210809_EcologieDesCommuns-127-146.pdf